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21 juin 22

La reprise se confirme sur le marché parisien des commerces

Knight Frank, conseil international en immobilier, publie son nouvel « Essentiel du commerce » dans lequel il dresse un état des lieux des grandes artères parisiennes à la fin du 1er semestre 2022

 

Le rebond de la fréquentation encourage les enseignes à se développer

Après une fin d’année 2021 positive, la situation des grandes artères commerçantes parisiennes s’est encore améliorée au 1er semestre 2022 en dépit des menaces pesant sur la situation politique et économique mondiale. Le redressement de la fréquentation en est l’une des principales causes, le marché des commerces bénéficiant à la fois du retour des salariés au bureau et de la reprise du tourisme international. Certes, quelques nationalités restent moins présentes qu’avant l’épidémie de Covid-19, les visiteurs en provenance d’Asie-Pacifique représentant par exemple 2 % à peine du trafic passager des aéroports de Paris contre plus de 6 % avant la crise sanitaire. Cependant, « le commerce parisien ne souffre pas autant qu’on le craignait de ce rétrécissement temporaire de la clientèle internationale. Après plus de trois années difficiles, marquées par le mouvement des gilets jaunes puis par l’épidémie de Covid-19, la demande immobilière des enseignes est redevenue vigoureuse grâce à la normalisation de la situation sanitaire et au retour des touristes, ainsi qu’à des conditions de négociation plus favorables aux preneurs du fait de l’ajustement des valeurs locatives ; ceci pousse les marques à reprendre ou accélérer leur expansion, et incite notamment de nouveaux acteurs à ouvrir pour la première fois à Paris » affirme Antoine Salmon, directeur du département Commerces locatif chez Knight Frank France. 

L’évolution des arrivées de nouvelles enseignes étrangères est un bon indicateur de l’attractivité parisienne. Après la chute de 2020 (16 arrivées seulement), 2021 avait vu un rebond du nombre de nouveaux entrants avec un total de 26 arrivées dont plusieurs acteurs de la livraison express ouvrant leurs premiers « dark stores » (FLINK, GETIR, GORILLAS, etc.). Si le flux de nouveaux quick commerçants s’est tari, celui des enseignes traditionnelles s’est en revanche amplifié. 14 arrivées ont ainsi été recensées à Paris au 1er semestre 2022, et elles seront au moins aussi nombreuses au 2nd semestre. Ces nouvelles marques appartiennent pour une bonne part aux secteurs de la mode et du sportswear comme STUSSY et GANNI dans le Marais, BROWNIE rue de Rennes, AIRNESS rue Etienne Marcel ou encore P448 rue du Faubourg Saint-Honoré. 

Luxe : les grandes manœuvres se poursuivent

La liste des nouveaux entrants récemment implantés à Paris ou attendus d’ici la fin de 2022 comprend un nombre important de marques haut de gamme ou de luxe, dans des secteurs variés comme l’équipement de la maison (V-ZUG), la joaillerie (DAVID YURMAN), les chaussures (AQUAZZURA) ou même l’art avec l’annonce de l’ouverture de la première galerie HAUSER & WIRTH au 26 bis rue François 1er. « Ces nouvelles arrivées contribuent au dynamisme des plus belles artères parisiennes, dont témoignent également les nombreux mouvements de marques établies de longue date dans la capitale. Toutes enseignes confondues, 14 ouvertures de boutiques de luxe ont été comptabilisées à Paris au 1er semestre 2022 et près d’une vingtaine au moins sont attendues au 2nd semestre » détaille Antoine Salmon. Le total de 2022 sera donc très proche de celui de l’an passé (34) et supérieur à celui de 2020 (29).

Les principales artères de la rive droite concentrent toujours la très grande majorité des ouvertures. Rue Saint-Honoré, KERING est notamment en train de renforcer ses positions avec l’extension d’ALEXANDER MCQUEEN au n°372-374 et l’arrivée programmée de GUCCI à l’angle de la rue Castiglione. Le Triangle d’Or est également très animé : la rue François 1er, l’avenue George V et l’avenue Montaigne représentent ainsi près d’un tiers des ouvertures de boutiques de luxe attendues en 2022 à Paris. Sur l’avenue Montaigne, l’actualité est particulièrement chargée entre inaugurations de grandes maisons après rénovation-extension (DIOR au n°30-32), transferts (JIMMY CHOO au n°41) et pop-up stores (TIFFANY au n°34, FENDACE au n°44). Ces différents mouvements redonnent un nouveau souffle à l’une des artères les plus exclusives de la capitale, sur un positionnement résolument tendance révélant les efforts menés par les groupes de luxe pour créer l’évènement et s’adapter aux nouveaux profils de consommateurs.

Contrairement aux années précédentes, le dynamisme du marché du luxe se diffuse également rive gauche. Au tournant des années 2010, la rue de Sèvres et le boulevard Saint-Germain avaient vu se multiplier les ouvertures de boutiques de marques prestigieuses (HERMES, RALPH LAUREN, BERLUTI, etc.), avant de retomber dans une certaine torpeur coïncidant notamment avec la fermeture de l’hôtel Lutetia pour rénovation. Quatre ans après la réouverture du seul palace de la rive gauche, le quartier connaît un regain d’intérêt illustré par quelques projets significatifs comme l’installation prochaine de SAINT LAURENT en lieu et place de l’ancien flagship SONIA RYKIEL du 175 boulevard Saint-Germain.

Une vacance globalement en baisse

La reprise de l’activité dans le secteur du luxe s’est accompagnée d’une réduction de la vacance dans quelques rues prestigieuses comme la rue Saint-Honoré (passée de 8,8 à 5,4 % depuis la fin de 2021), la rue du Faubourg Saint-Honoré (de 13,7 à 11,0 %) ou la rue de la Paix (de 10,6 à 8,5 %). Ailleurs, la vacance est inexistante (place Vendôme) ou très limitée (avenue Montaigne).

La situation reste également très contrastée hors des artères de luxe. La reprise de la demande des enseignes est en effet inégale. Celles-ci privilégient les meilleurs emplacements, ce qui a pour conséquence de maintenir les taux de vacance à des niveaux parfois élevés. C’est le cas du boulevard Saint-Michel : malgré une baisse significative de 5 points celui-ci atteint encore 14,8 %, et les mouvements récents concernent avant tout sa portion la plus fréquentée, celle comprise entre le boulevard Saint-Germain et les quais de Seine (NBA au n°20, BOULINIER au n°18, Bo & Mie au n°7, etc.). Ailleurs, la tendance est également à la diminution ou à la stabilisation de la part des locaux disponibles. C’est le cas de quelques grands axes mass-market parisiens, comme la rue de Rennes et la rue de Rivoli dont le taux de vacance se stabilise autour de 7,5 %, ou l’avenue de l’Opéra où celui-ci reste légèrement supérieur à 10 %. Enfin, le taux de vacance est quasi nul rue de Passy, de même que rue des Francs Bourgeois où celui-ci est passé de 6,6 % à 1,1 % en un an alors qu’il dépasse encore les 10 % dans d’autres rues du Marais (12,9 % rue des Archives).

« Depuis un an, l’évolution des grandes artères commerçantes parisiennes a été globalement positive. Certes, le choc créé par la crise sanitaire a été soudain et violent et continue de peser sur l’activité ; ses effets tendent néanmoins à s’estomper, montrant que la reprise observée depuis la fin du 3e confinement n’était pas qu’un feu de paille. Après un relatif statu quo, la demande des enseignes est même devenue particulièrement soutenue sur les Champs-Elysées, où plusieurs mouvements importants se concrétiseront ces prochains mois et absorberont une partie des projets en cours de commercialisation » précise Antoine Salmon. Après les quelques transactions significatives de 2021 (PSG au n°92, FOOT LOCKER au n°36), le 1er semestre 2022 a d’ores et déjà été marqué par plusieurs transactions importantes dont la prise à bail par ZARA de près de 3 000 m² au n°74, où la marque espagnole ouvrira en 2023 une surface deux fois plus étendue que celle de son magasin actuel du n°92. ZARA prépare aussi l’extension sur 1 500 m² de surface de vente de son magasin du 88 rue de Rivoli. Elle fait donc plus que jamais du « flagship » son format stratégique, lui permettant d’élargir son offre et de la moderniser en déployant de nouveaux concepts mêlant physique et digital.

Le commerce parisien poursuit sa mue

Pour d’autres enseignes de mode, la stratégie est également d’optimiser les réseaux de points de vente en libérant des magasins inadaptés mais sans forcément les remplacer par de plus grandes surfaces dans Paris. C’est le cas d’H&M, qui a en revanche étendu sa présence dans « Les 4 Temps » à La Défense et prépare la première ouverture en France d’ARKET, son concept plus pointu sur une surface bien plus modeste dans le Marais. D’autres acteurs historiques de l’habillement réduisent encore plus drastiquement leur empreinte à Paris, comme C&A, qui a programmé la fermeture de ses deux paquebots dont celui du 126 rue de Rivoli. « Comme d’autres projets, ces libérations permettent de retravailler l’existant au profit de programmes réduisant la part des commerces et proposant une offre mixte plus en phase avec les tendances de marché et les nouveaux modes de consommation dans des quartiers bénéficiant d’une fréquentation importante » explique Antoine Salmon.

Accélérée par la crise sanitaire et révélatrice de la transformation des grandes artères parisiennes, la réduction progressive de la part de la mode ne concerne pas que les surfaces des grandes chaînes spécialisées. Si la mode représente toujours la plus grande part des ouvertures (36 % de celles recensées depuis un an sur les grandes artères parisiennes), elle est aussi à l’origine des départs les plus nombreux (32 %), devant le secteur des accessoires (20 %) et celui des services (16 %). En revanche, certains secteurs ouvrent davantage de magasins qu’ils n’en ferment : l’alimentation-restauration, les loisirs et l’équipement de la maison. Dans cette dernière catégorie, la diversité des formats est également de mise, les projets de l’enseigne haut de gamme CARAVANE rue Jacob et rue de Passy contrastant par exemple avec l’implantation à venir du premier magasin parisien de FABRIQUE DE STYLES au 18 boulevard des Capucines. Le développement d’enseignes de périphérie s’observe également hors des axes prime, à l’image des ouvertures récentes ou à venir de KIABI, ALDI ou encore AVIVA CUISINES dans le 13e.

Enfin, la mutation du commerce parisien est aussi illustrée par la profusion de pop-up stores. Sur les artères de luxe ou les quartiers les plus tendance comme le Marais, leur multiplication confirme l’importance du magasin comme support de communication de marques s’adaptant au renouvellement des profils de consommateurs et à l’hybridation des formats de distribution. Les nombreuses collaborations entre marques (FENDI/VERSACE, GUCCI/ADIDAS, JACQUEMUS/NIKE, APC/LACOSTE, SWATCH/OMEGA, etc.) en sont le parfait exemple. Dans d’autres cas, la multiplication des magasins temporaires souligne le besoin de flexibilité d’enseignes qui ne peuvent s’engager sur de longues périodes ou souhaitent tester la pertinence de leur offre commerciale en profitant de valeurs locatives réajustées.

Des perspectives incertaines mais plutôt encourageantes

Après un 1er semestre animé, la demande immobilière des enseignes ne semble pas devoir s’essouffler d’ici la fin de 2022. Malgré la guerre en Ukraine, l’envolée de l’inflation et la menace toujours latente des variants, le tourisme reste sur une trajectoire positive grâce à la levée progressive des restrictions de voyage. Par ailleurs, les grandes artères parisiennes sont moins exposées que d’autres territoires aux dépenses de consommateurs se déplaçant en voiture et subissant de plein fouet la forte hausse du prix des carburants.

Néanmoins, la reprise restera très inégale et continuera de bénéficier avant tout aux meilleurs emplacements parisiens. Si aucun évènement ne vient geler les plans d’expansion des enseignes (forte aggravation des tensions géopolitiques, détérioration importante de la situation sanitaire, etc.), les prochains mois devraient donc confirmer la diminution des taux de vacance ainsi que le retour progressif des valeurs locatives de certains axes au niveau d’avant crise. A l’inverse, les moins bons emplacements mettront davantage de temps à se remettre du choc lié à l’épidémie de Covid-19, avec une vacance durablement élevée, des mouvements reflétant parfois une certaine baisse de gamme et des commerçants plus impactés dans leur activité par la revalorisation des loyers indexés malgré la modification récente du calcul de l'indice national trimestriel des loyers commerciaux (ILC).    

A plus long terme, les perspectives sont plutôt encourageantes. « Le retour rapide, bien qu’encore partiel, des touristes étrangers a montré que Paris restait une destination privilégiée, tandis que le rebond des dépenses a confirmé l’attachement des consommateurs au commerce physique. Sans préjuger de l’évolution de la situation politique et économique mondiale, la reprise pourrait donc encore s’accélérer grâce au retour de nationalités encore absentes ainsi qu’aux opportunités liées aux Jeux Olympiques de 2024 » conclut Antoine Salmon.