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25 jan. 23

Combien vaut une station de sports d’hiver ?

Projet de cession ou d’agrandissement du domaine skiable : plusieurs situations requièrent de faire appel à un expert immobilier pour évaluer le prix d’une station de montagne. Technique et pointue, cette expertise obéit à des règles spécifiques. La Chambre des Experts Immobiliers de France (CEIF) éclaire sur les critères d’évaluation d’un tel actif.

De nombreux propriétaires et partenaires commerciaux

Une station appartient souvent à une centaine de propriétaires fonciers différents, en indivision, des agriculteurs, des groupements pastoraux pour les alpages en général. La montagne est régie par la loi Montagne et les documents d’urbanisme.

Ainsi, la gestion des remontées mécaniques peut être assurée par différents acteurs : des régies ou sociétés d’économie mixte liées aux collectivités locales, des opérateurs privés, parfois des familles autochtones comme les frères Huillier à Villard-de-Lans (jusqu’au rachat par le basketteur Tony Parker en 2019) ou encore, des sociétés spécialisées dans le loisir – on citera la Compagnie des Alpes, à la tête des plus grands domaines skiables français (La Plagne, Les Arcs, Tignes, Val d’Isère, Méribel, Les Menuires ou encore Serre Chevalier…).

« Rencontrer ces nombreux partenaires économiques, mais aussi les associations environnementales, demande du temps. Expertiser une station de montagne prend, au moins, deux mois à temps complet » témoigne Dominique Tournier, expert en évaluation immobilière, secrétaire générale adjointe de la CEIF et spécialiste des expertises en milieu montagnard.

Les éléments déterminants pour l’expertise

Les éléments structurants

« On analyse tout : la situation géographique, l’accessibilité, le sol, le sous-sol, la faune, l’obsolescence des infrastructures, la qualité et l’étendue du domaine skiable. Par exemple, plus il y a de diversités de dénivelés permettant d’offrir un échantillon de pistes allant de la verte à la noire, meilleur c’est » explique Dominique Tournier.

Le coût de construction est un élément déterminant : vis-à-vis de la question des sous-sols, l’expert « fait appel à de vraies études géologiques » explique-t-elle, « on étudie les cartes de géologie, les roches, la qualité du pendage des couches. Si elles sont friables, le coût de la construction sera tellement élevé que cela peut devenir rédhibitoire. »

Même la végétation doit être prise en compte : cette dernière informera sur l’humidité du sol, la luminosité des parcelles et la température moyenne. À l’issue de l’ensemble des rencontres et des études, un rapport délivrera une valeur vénale à date de la remise ; le commanditaire, en cas de désaccord, pourra toujours demander une contre-expertise.

L’adaptation aux nouvelles attentes

Avant tout, estimer un domaine skiable revient à estimer un domaine pour son attractivité nationale et internationale, pour son niveau d’équipement (qualité et quantité de remontées mécaniques, système d’enneigement artificiel), pour son positionnement mais également pour la qualité de son hébergement.

« Ce qui compte principalement, c’est la vie économique globale de la station autour de son activité première », précise Dominique Tournier. La qualité du parc immobilier, la qualité des équipements sportifs indoor et outdoor sont également importants, tout comme le maintien d’une activité l’été ou la présence d’une enseigne forte de village vacances, d’un festival ou d’une compétition internationale.

L’expert analyse aussi la valeur du domaine au regard de son mode d’exploitation, ainsi que des taux de remplissage de la station (ce qu’on appelle communément les lits « chauds » et les lits « froids »). En réalité, c’est tout une série de paramètres qui impacte la valeur d’une station et intrinsèquement les biens qui y sont situés : quelle est la durée de la délégation d’exploitation du domaine skiable ? Quels sont les engagements d’investissement ? Quels sont les retombées, les bénéfices financiers pour les communes ?   

Une évaluation du foncier bâti complexifiée par les nouvelles règles

Du fait de la flambée des prix de l’immobilier dans les stations suite à la pandémie de COVID 19, il est encore plus difficile d’expertiser un bien à la montagne. De même, le nouveau diagnostic de performance énergétique (DPE) et les nouvelles normes sont particulièrement cinglantes pour ce parc immobilier souvent ancien et très énergivore.

« Pour les chalets c’est plus simple, on peut isoler et trouver avec un financeur des solutions directes face à la déperdition d’énergie. Mais pour les immeubles en copropriété, la rénovation thermique va dépendre du syndic et de l’implication des copropriétaires » souligne Dominique Tournier.

Le vrai prix d’une station de ski

Une station peut valoir plusieurs dizaines de millions d’euros si elle est renommée et dispose d’un domaine skiable en altitude… Excepté les fois où elles sont valorisées à un euro symbolique, si elle est endettée ou structurellement désavantagée (altitude, ensoleillement…). Par exemple, en Isère, la station de Saint-Honoré 1500 a été victime du manque de neige, du réchauffement climatique et d’un grave problème de gestion : inachevée, en partie abandonnée, elle ne vaut plus rien aujourd’hui en tant que station de ski.

« C’est un phénomène moins unique qu’il n’y parait : dans les années 60, on a cherché à déployer le tout-ski dans des territoires de moyenne montagne, qui ne s’y prêtaient pas. De petites stations à vocation purement familiale et journalière ont fermé ou lorsqu’elles étaient ouvertes à la vente n’ont jamais trouvé preneurs ! Comme la station du Col du Coq en Chartreuse. A l’autre extrémité, aujourd’hui, ce qu’on constate est que celles qui ont réussi le pari de la diversification, tant au niveau de l’offre de services que de l’ouverture à toutes les saisons, gagnent d’autant en plus-value » résume Dominique Tournier.

Autre critère notable souvent sous-estimé, celui de la concurrence internationale entre stations de ski. Aujourd’hui, les stations doivent se mettre au diapason des stations suisses, autrichiennes, qui ont réussi plus tôt qu’en France le pari du verdissement. Les stations françaises doivent se moderniser, se rénover pour rester à niveau. Parmi les autres défis, les ressources humaines qui animent la station : avec des difficultés de recrutement et de logement des saisonniers. S’il existe, sur la station ou dans la commune, des solutions d’hébergements dédiées, cela est valorisé.

Qui sont les experts de la CEIF (Chambre des experts immobiliers de France) ?

La CEIF rassemble plus de 700 experts immobiliers exerçant leur mission en France métropolitaine et dans les départements d'outre-mer. Ils interviennent dans de nombreux domaines au-delà du résidentiel et ont souvent une ou plusieurs spécialités : fonciers, fonds de commerce, meublés de tourisme, biens exceptionnels, grottes, monastères, aérodromes, centres aquatiques, etc. Certains de ces professionnels sont certifiés REV et TRV, des certifications européennes attestant de leur compétence dans ces spécialités. Nombre d’entre eux sont des experts judiciaires intervenant près des tribunaux.

Enfin, pour Denis PELOUSE, Président de la Chambre des Experts Immobiliers de France : « Faire appel à un Expert en évaluation immobilière agréé CEIF est un gage de sérieux et d’indépendance, car les missions sont exécutées de façon objective sans prise de mandat des actifs expertisés et en respectant les normes de la profession. »