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22 nov. 23

Note de conjoncture FNAIM Novembre 2023 : "Après avoir atteint des sommets, le marché en manque d'oxygène"

La crise annoncée est aujourd’hui devenue réalité. Le quadruplement des taux d’intérêt en 2 ans a eu raison de la dynamique du marché. Le nombre de ventes de logements anciens baisse nettement à 955 000 ventes sur 12 mois à fin août 2023 (soit -17% sur un an), et les prix se sont infléchis et s’inscrivent en légère baisse. L’inflation a légèrement reflué mais reste élevée : 4% en septembre 2023. Le marché est désormais plus favorable aux acquéreurs. L’année 2023 devrait se terminer avec un record historique de baisse de ventes sur un an (-21%, à 885 000 ventes), et une baisse des prix. En 2024, la baisse des prix doit s’accélérer pour redonner du pouvoir d’achat aux acheteurs. Et l'offre de biens disponibles à la vente s’est reconstituée et ne constituera plus un facteur de soutien pour les prix en 2024. Globalement, le marché du logement est passé d’une pénurie à l’autre : avec le blocage du marché de la transaction, la pénurie de biens à vendre s’est résorbée mais s’est transformée en pénurie de biens à louer. Avec, en toile de fond, une offre de logements insuffisante, notamment dans certaines zones tendues. Des mesures publiques d’accompagnement aptes à répondre aux difficultés rencontrées sont plus que jamais nécessaires.

Une inflation persistante

L’INSEE et la Banque de France prévoient une croissance modeste du PIB à +0,9% en 2023, tout comme en 2024 (+0,9%), et un léger redressement en 2025 (+1,3%). Une croissance moindre n’est toutefois pas à exclure. L’indicateur à suivre reste l’inflation. L’indice mensuel demeure à un niveau relativement élevé en octobre 2023 à +4,0 %. L’inflation a commencé à refluer ces derniers mois en Europe, et également en France. En comparaison européenne (indice harmonisé IPCH, à +4,5% en France), l’inflation avait nettement plus augmenté en zone euro qu’en France, mais elle baisse désormais nettement plus en zone euro. Ces différences sont en partie liées à la mise en place du bouclier tarifaire sur l’énergie en France.

L’impact des hausses de taux directeurs de la BCE (hausses désormais en « pause ») commence à être perceptible sur l’économie, comme souvent, environ 12 à 18 mois après le début du cycle de hausses de taux. De son côté, la confiance des ménages reste en berne et proche de son plus bas niveau depuis 2000.

Des taux des crédits toujours en hausse 

En lien avec l’essoufflement des volumes, la production de crédits est en baisse sensible depuis le mois de juin 2022. En octobre 2023, la production de crédit est au plus bas depuis 2014. La production de crédit pâtit non seulement de la baisse des ventes dans l’ancien et de la chute dans le neuf, mais aussi d’un recours réduit au crédit de la part des emprunteurs. Tandis qu’en période de taux très bas, il n’était pas nécessairement pertinent de maximiser son apport personnel, puisqu’on pouvait parfois épargner à un taux supérieur au taux de son crédit.

Les taux des crédits immobiliers continuent d’augmenter. A fin octobre 2023, les taux des crédits immobiliers ont grimpé à 3,48 % d’après les chiffres de la Banque de France (et 3,84% hors renégociations de crédit). D’après l’Observatoire Crédit Logement/CSA, ils seraient même passés de 1,1 % en février 2022 à 4,12 % en octobre 2023, soit 3 points d’augmentation.

Cette hausse des taux rend par ailleurs plus contraignantes les règles du HCSF, qui jusque-là n’étaient pas un véritable frein au marché, car la marge pour augmenter la durée des crédits est très faible. Même si le taux d’usure n’est plus un frein pour le marché, le contexte est devenu plus difficile pour les primo-accédants avec un faible apport. Par ailleurs, au-delà de la hausse des taux, les banques sont devenues plus sélectives pour se protéger contre la probable baisse à venir des prix des biens.

Enfin, en l’absence de portabilité des prêts immobiliers, la hausse des taux n’incite pas les ménages déjà propriétaires à déménager, au risque de voir leur taux de crédit augmenter sensiblement par rapport à leur crédit en cours. Le nombre de ventes « de confort », non dictées par les aléas de la vie (naissance, divorce, décès…), devrait ainsi diminuer.

Poursuite de la baisse rapide des ventes

La baisse des ventes de logements, entamée depuis septembre 2021, s’accélère depuis début 2023 : à fin août 2023, 955 000 ventes avaient été réalisées sur 12 mois (-17% sur un an). Sur les 8 premiers mois de 2023, les ventes baissent même de 21% par rapport à la même période en 2022. La baisse des ventes sur l’ensemble de l’année 2023 devrait être d’au moins 20%, ce qui correspondrait à environ 885 000 ventes. Le nombre de transactions redescendrait donc en-dessous des niveaux « pré-covid », et reviendrait plus de 6 ans en arrière. Surtout, il s’agirait de la plus forte baisse des ventes sur un an jamais observée depuis plus de 50 ans. Un choc majeur pour le marché immobilier.

La baisse des ventes se fait un peu plus ressentir dans l’Ouest (où les prix et les ventes avaient le plus augmenté) et le Nord du pays.

A noter que sur le marché du neuf, les ventes se sont effondrées depuis 18 mois, et sont au plus bas depuis 1995. Le mal semble plus profond sur le marché du neuf (contraint par le coût de la main d’œuvre et des matières premières notamment) que sur celui de l’ancien. En apparence, les prix du neuf ne baissent pas, mais de plus en plus de remises de prix sont accordées, qui ne sont pas visibles dans les prix faciaux.

Prix : les grandes villes dans le rouge, sauf dans le Sud

Comme habituellement en début de cycle baissier, la baisse des volumes est suivie d’une baisse des prix, qui se matérialise depuis début 2023. Après avoir fortement augmenté avant et après le covid (sauf à Paris), l’évolution des prix s’est retournée et les valeurs s’inscrivent désormais en légère baisse. La forte hausse des taux des crédits immobiliers depuis début 2022 rend nécessaire cette baisse des prix (en pente douce jusqu’à présent) pour préserver la capacité d’achat des acheteurs. On observe un net fléchissement de la demande. A l’échelle nationale, les prix sont en baisse de 0,7% au 1er novembre par rapport au 1er janvier.

Cette baisse concerne la plupart des zones, à l’exception des stations balnéaires qui résistent encore (+1,4% sur 10 mois). Paris (-4,3%) et sa périphérie (-2,6%) sont les plus touchées. La banlieue parisienne est même la zone où les prix ont le moins augmenté depuis 10 ans. Les autres grandes villes connaissent des baisses de prix : Lyon (-4,9% sur depuis le 1er janvier), Nantes (-3,7%), Rennes (-3,0%), à l’exception des villes méditerranéennes (Nice et Montpellier). D’une manière générale, le marché baisse le plus là où les prix sont les plus élevés, car la sensibilité des acquéreurs aux taux des crédits y est plus forte.

La majorité des départements connaissent une baisse des prix, mais ce n’est pas le cas de la Corse et de la côte méditerranéenne (notamment Alpes Maritimes et Var).

De manière générale, on assiste à un changement de cycle et à un rééquilibrage du marché au profit des acheteurs, qui reprennent le pouvoir. A ce stade, la baisse des prix est encore relativement modeste et loin de compenser la hausse des taux (même en tenant compte de la hausse des revenus). Les vendeurs mettent du temps à intégrer la nouvelle donne du marché et le changement de rapport de force avec les acheteurs. L’euphorie post-covid a entraîné une pénurie de biens à vendre. Cette situation de sous-offre (conjointe avec la chute de l’offre dans le neuf) a constitué un goulet d'étranglement, un facteur de soutien temporaire pour les prix, qui est en train de s’estomper. L’essentiel de la baisse des prix est donc encore probablement devant nous.