Pour lutter notamment contre l’autocensure, de plus en plus de bailleurs sociaux proposent certains HLM sur des sites généralistes. Ce recours à un circuit inhabituel, assumé par les bailleurs et les pouvoirs publics, pose toutefois question.
Des annonces similaires aux autres biens proposés à la location, et pourtant les logements proposés sont en réalités classés « prêt locatif social » (PLS), un des trois types de HLM, destinés aux classes moyennes. Pourquoi cette stratégie, quand les logements sociaux ont pourtant un circuit officiel ? « Les classes moyennes s'autocensurent », justifie Ian Brossat, adjoint communiste au logement à la Mairie de Paris, qui explique que « ces annonces sur un site généraliste permettent aux bailleurs de cibler un public qui n'est habituellement pas le leur ». « Beaucoup de personnes ne savent pas qu'elles sont éligibles au logement social ou intermédiaire », abonde Emmanuelle Copin, directrice générale adjointe du bailleur social Paris Habitat.
Des logements « moches » et non pourvus par le circuit classique
Pour autant, si ces logements sociaux sont ainsi proposés en ligne par les deux principaux bailleurs sociaux de la Ville de Paris, Paris Habitat et la RIVP, c’est souvent qu’ils n’ont pas trouvé preneurs. Emmanuelle Copin le concède : si ces logements se retrouvent sur SeLoger.com, c'est « qu’ils n'ont pas intéressé les demandeurs qui sont inscrits sur le fichier central ». Une source interne à Paris Habitat est encore plus directe : « Les logements qu'on met sur SeLoger sont les plus moches et les plus chers », lâche-t-elle.
De quoi tempérer les critiques des associations, qui s’indignent de cette pratique. Pour le porte-parole de l'association Droit au logement (DAL), Jean-Baptiste Eyraud, la pratique pose problème, alors que 250 000 demandeurs attendent un HLM par procédure officielle. « Plutôt que de mettre des annonces sur SeLoger avec des loyers chers, suggère-t-il, les bailleurs n'ont qu'à baisser leurs prix et les proposer sur le circuit normal aux familles plus modestes qui attendent depuis des années ! » Du côté de la mairie, on assure cependant que les dossiers des candidats passent par une commission d’attribution et sont bien loués à des ménages qui répondent aux conditions. Sans passer par l’interminable file d’attente.
Source : Le Point / reproduction interdite