Contact médias : Carol Galivel - 01 41 05 02 02
Le marché des bureaux retrouve du tonus
Après le choc de 2020, qui avait fait plonger les prises à bail à leur niveau le plus bas depuis 25 ans, les commercialisations de bureaux ont commencé à se redresser dès le début de 2021. L’activité s’est ensuite accélérée au 2nd semestre, culminant en fin d’année malgré la déferlante Omicron. Si plusieurs indicateurs sont de nouveau au vert, les performances du marché locatif des bureaux d’Ile-de-France sont néanmoins contrastées. Knight Frank France dresse le bilan de l’année 2021 et livre quelques perspectives pour 2022.
Hausse de 32 % de la demande placée
Après un début d’année encourageant, le marché des bureaux d’Ile-de-France s’est progressivement redressé en 2021. « L’activité a culminé au 4e trimestre avec 600 700 m² pris à bail contre 430 000 m² à la même période en 2020. L’année s’est ainsi achevée sur une note très positive, les volumes placés s’élevant à 1,88 million de m² sur l’ensemble de 2021 soit un rebond de 32 % par rapport à 2020 » annonce Guillaume Raquillet, directeur de l’agence Bureaux chez Knight Frank France. La performance de 2021 est même nettement supérieure aux niveaux atteints lors de précédents chocs, qu’il s’agisse de l’explosion de la bulle Internet (+ 27 % par rapport à 2002), de la grande crise financière internationale (+ 2 % par rapport à 2009) ou de la crise de la dette européenne (+ 8 % par rapport à 2013).
Le résultat de 2021 est d’autant plus satisfaisant que le regain de la demande a concerné tous les créneaux de surfaces, qu’il s’agisse des bureaux de moins de 1 000 m², dont les volumes placés ont progressé de 49 % en un an, de ceux de taille intermédiaire (+ 19 %) mais aussi des surfaces supérieures à 5 000 m². « Au nombre de 55 en 2021 contre 22 en 2020, les prises à bail de bureaux de plus de 5 000 m² ont totalisé 555 600 m² soit une hausse de 29 % par rapport à l’année précédente. Confirmant le réenclenchement par les grands groupes de leurs projets immobiliers, elles ont ainsi directement contribué au redressement du marché francilien » poursuit Guillaume Raquillet. Toutefois, le créneau des grandes transactions et le marché dans son ensemble n’ont pas encore renoué avec leurs performances d’avant crise. Ainsi, lors des cinq années précédant l’épidémie, 74 grandes transactions étaient recensées chaque année et le volume placé, toutes surfaces confondues, était en moyenne supérieur de 31 % à celui de 2021.
La baisse de la demande placée s’annonce durable à cause des incertitudes persistantes de la situation sanitaire et des transformations structurelles des modes de travail. Désormais bien ancré – plus de la moitié des Franciliens le pratiquent deux à trois jours par semaine – le télétravail a bien évidemment des répercussions sur la consommation des surfaces de bureaux. En 2021, la surface moyenne des prises à bail supérieures à 5 000 m² s’est ainsi réduite de 24 % par rapport à celle des transactions signées entre 2010 et 2019, et plusieurs grandes entreprises ont même loué des bureaux d’une taille inférieure de 40 % voire plus à ceux qu’elles occupaient précédemment.
Rôle moteur des acteurs de l’innovation et du savoir
Les réductions de surfaces liées à la crise sanitaire et au télétravail concernent la plupart des secteurs d’activité. Certains, plus impactés que d’autres, avaient déjà engagé la rationalisation de leur immobilier avant le déclenchement de l’épidémie de Covid-19, à l’instar des grandes banques françaises ou des assureurs. De même, le secteur public a été assez peu actif en 2021, même si de grandes opérations sont en cours en 1ère couronne, dans le Nord en particulier. « La relative faiblesse des volumes commercialisés auprès de ces secteurs, traditionnellement consommateurs de grandes surfaces en périphérie, a été partiellement compensée par le dynamisme d’autres types d’acteurs, dans les domaines de l’innovation et du savoir notamment. Le marché francilien profite ainsi des transformations de l’économie et du renouvellement de la demande de ses utilisateurs de bureaux » explique Guillaume Raquillet. De fait, de nombreuses surfaces ont été louées en 2021 par des représentants de la French Tech (LEDGER, VOODOO, etc.), des incubateurs (CAMPUS CYBER, PARISANTE CAMPUS, etc.) et des acteurs de l’enseignement supérieur. Portés par la hausse constante des effectifs et la multiplication de grands campus, les écoles de commerce et les grands groupes privés ont été particulièrement présents, avec quatre opérations de plus de 5 000 m² recensées en périphérie (EM NORMANDIE à Clichy, EM GRENOBLE à Pantin, OMNES EDUCATION dans Cœur Défense, IGS à Nanterre).
Le QCA a dépassé son niveau d’avant crise
Dans la capitale, les volumes placés se sont élevés à près de 790 000 m² en 2021, soit une hausse de 47 % sur un an. Avec 430 000 m² pris à bail, la progression est particulièrement importante dans le QCA (+ 73 %), qui est aussi le seul secteur d’Ile-de-France avec La Défense à avoir amélioré son résultat de 2019 (+ 12 %). « Comme nous le pressentions dès le premier confinement, le QCA a très bien résisté à la crise sanitaire, qui a accru la demande pour des bureaux prime, parfaitement accessibles et situés dans des quartiers animés à l’heure où les facteurs RH et RSE sont de plus en plus cruciaux. Le quartier central des affaires a également bénéficié de la richesse de son tissu économique, abritant des entreprises de tailles et de secteurs très variés parmi lesquels plusieurs activités n’ayant pas ou peu souffert de l’épidémie. Outre celle des entreprises de la Tech, qui ont progressivement repris leur expansion lors d’une année marquée par des levées de fonds record, le QCA a aussi profité de la forte demande d’entreprises de secteurs comme la finance ou les avocats » détaille Guillaume Raquillet. Enfin, le QCA a profité à partir de la seconde partie de l’année du redressement des prises à bail d’opérateurs de coworking, sur fond d’augmentation des taux de remplissage de leurs centres. Encore en retrait par rapport à la période d’avant crise, le volume de ces prises à bail a progressé de 46 % sur un an en Ile-de-France et s’est une fois de plus largement concentré dans le QCA (54 % du volume total en 2021 contre 39 % entre 2015 et 2020).
Un bon cru pour La Défense
Hors de Paris, La Défense s’est notamment distinguée. Si les volumes placés en 2021 y reculent de 10 % sur un an du fait de la signature en 2020 de la transaction TOTAL (125 000 m² dans « The Link »), ils sont légèrement supérieurs de 5 % à la moyenne des cinq années précédant l’épidémie. 11 opérations supérieures à 5 000 m² y ont été signées en 2021 contre trois en 2020 et cinq en 2019. Reflétant la réduction de la taille des surfaces prises à bail par les entreprises, la grande majorité a néanmoins porté sur des surfaces inférieures à 15 000 m². Le segment des surfaces intermédiaires est également bien orienté, avec un peu plus de 30 transactions comprises entre 1 000 et 5 000 m². Le rebond du marché de La Défense n’est pas une surprise : le quartier d’affaires a su tirer son épingle du jeu grâce au très bon rapport qualité-prix de son offre de bureaux, qui lui a permis d’attirer des utilisateurs originaires de Paris et de secteurs voisins.
La plupart des autres pôles tertiaires franciliens enregistrent une hausse du nombre de transactions et des volumes placés d’une année sur l’autre, à l’exemple de certains secteurs de l’Ouest ou de la 1ère Couronne Nord. Dans le Nord, les grandes transactions ont retrouvé au 2nd semestre 2021 leur rôle moteur habituel (quatre signatures finalisées sur la période contre deux au 1er semestre). Cette dynamique ne devrait pas faiblir en 2022 du fait de l’avancée des projets liés aux Grand Paris Express et aux JO de 2024 et d’une offre abondante et compétitive.
Les écarts se creusent entre les actifs trophées et le reste du marché
Dans les marchés de bureaux les plus offreurs, les conditions de négociation plus favorables aux preneurs contribuent en effet au regain de l’activité locative. Les baux signés en 2021 révèlent ainsi des mesures d’accompagnement généreuses, parfois supérieures à 30 % pour des biens neufs-restructurés comme de seconde main. Les loyers de présentation ont également pu être revus à la baisse par les bailleurs, avec un recul le plus souvent compris entre 5 et 10 % du loyer initial mais dépassant parfois les 20 %. Si tous les types d’actifs sont concernés (neufs, restructurés ou de seconde-main), la correction a été plus fréquente dans certains secteurs géographiques comme le Croissant Ouest et La Défense, qui concentrent ainsi plus de 70 % du nombre d’offres dont le loyer a été corrigé à la baisse l’an passé.
Dans le QCA, le loyer prime reste à des niveaux élevés. « Après la progression annuelle de 9 % enregistrée en 2020, le loyer prime atteint désormais 935 €/m²/an contre 940 €/m²/an il y a un an et 865 €/m²/an à la fin de 2019. L’une des évolutions marquantes de 2021 a été la nette augmentation du nombre de prises à bail signées à des valeurs égales ou supérieures à 900 €/m²/an : une dizaine ont été recensées en 2021 sur des surfaces de plus de 1 000 m², contre trois en 2020 et aucune en 2019 » souligne Guillaume Raquillet. Soutenue par la forte demande d’entreprises de la finance, du luxe, du secteur juridique et du conseil, la hausse des loyers des meilleurs actifs du QCA devrait se poursuivre en 2022 du fait d’une offre limitée de surfaces de Grade A, continuant ainsi de creuser l’écart entre les biens exceptionnels et le reste du marché.
L’offre immédiate se stabilise
A la fin du 4e trimestre 2021, l’offre immédiate totalisait 4,04 millions de m² en Ile-de-France. En un an, 465 000 m² de bureaux se sont ainsi ajoutés au volume de l’offre disponible, soit une hausse de 13 %. La situation s’est toutefois stabilisée au 2nd semestre grâce à la décélération des livraisons de bureaux disponibles et au rebond des commercialisations. Le taux de vacance est désormais de 7,3 % contre 6,5 % un an auparavant et reste donc en deçà du pic de 2014 (7,7 %). La situation reste néanmoins très contrastée géographiquement. La quasi-totalité des secteurs parisiens et la 1ère Couronne Est affichent des taux de vacance inférieurs à 5 %. Les disponibilités sont en revanche très abondantes dans le Nord et dans la Péri-Défense, avec des taux de vacance compris entre 17 et 20 % et historiquement élevés. La Défense est dans une situation intermédiaire : le taux de vacance s’y établit à 12,6 % soit une hausse de près de trois points sur un an, mais l’absorption de grandes surfaces disponibles a partiellement compensé les nouvelles livraisons.
Des poches importantes de disponibilités en 2022
« 1,2 million de m² de bureaux ont été livrés l’an passé en Ile-de-France, un volume au plus haut depuis 2015, en partie gonflé par les livraisons initialement prévues en 2020 mais reportées en raison du premier confinement. En 2022, le rythme ne ralentira que modérément avec 987 000 m² attendus dont 69 % sont encore disponibles. Ce taux s’élève à 80 % pour l’ensemble des 108 opérations neuves-restructurées supérieures à 5 000 m² actuellement en cours de chantier et à livrer entre le début de 2022 et la fin de 2024 » détaille Guillaume Raquillet. Malgré la crise sanitaire et le redimensionnement à la baisse de certains projets, l’offre à venir reste donc conséquente. Néanmoins, la situation varie très fortement selon le secteur tertiaire. Comme pour l’offre disponible, la 1ère Couronne Nord et la Péri-Défense concentrent une part importante des volumes projetés en Ile-de-France (22 % et 13 % respectivement). Le déséquilibre est particulièrement marqué dans le Nord, où plus de 650 000 m² sont attendus d’ici la fin de 2024 dont 84 % sont encore disponibles. A La Défense, le taux de pré-commercialisation est également très faible (8 %). Toutefois, les rythmes de livraison y diminueront sensiblement après 2022, ce qui, combiné au rebond de l’activité locative, annonce à terme une situation plus équilibrée. Enfin, Paris intramuros restera assez peu offreur, en particulier dans le QCA où 46 % de l’offre disponible de plus de 5 000 m² attendue d’ici la fin de 2024 est déjà pré-louée.
Un nouvel élan pour la transformation des bureaux en logements
L’abondance de l’offre récemment livrée ou à venir en Ile-de-France complique l’écoulement des biens les moins adaptés aux nouvelles attentes des utilisateurs. La question de l’avenir des bureaux obsolètes devient d’autant plus centrale qu’ils représentent une part importante du parc tertiaire francilien. « Les surfaces disponibles depuis plus de quatre ans en Ile-de-France représentent 1,3 million de m² à la fin de 2021, soit un peu plus de 30 % du volume total de l’offre. Très rares dans la capitale et même quasiment inexistantes dans le QCA, ces offres disponibles depuis plus de quatre ans se concentrent plus particulièrement dans trois secteurs : la 2e couronne, la 1ère couronne Nord et la Péri-Défense » analyse Guillaume Raquillet. Le devenir des offres disponibles depuis plus de quatre ans dans le Nord et la Péri-Défense paraît d’autant plus incertain qu’il s’agit aussi des pôles tertiaires où l’offre future est la plus abondante, et que celle-ci va donc nécessairement intensifier la concurrence entre actifs ; mais d’autres secteurs sont concernés et pourraient l’être de plus en plus compte-tenu de l’impact du télétravail et de la baisse sans doute durable des commercialisations de bureaux dans les marchés les plus excentrés. « Les difficultés d’écoulement de nombreuses offres de bureaux expliquent l’intérêt d’un nombre croissant d’opérateurs, promoteurs, bailleurs sociaux ou foncières, pour la transformation en logements à l’heure où l’offre résidentielle reste nettement insuffisante et où l’objectif de lutte contre l’étalement urbain, réaffirmé l’an passé par la loi Climat et Résilience, se fait de plus en plus pressant. Si les changements d’usage ne sont pas toujours aisés, les conversions connaissent ainsi un nouvel élan que l’année 2022 devrait accentuer » conclut Guillaume Raquillet.