Contact médias : Carol Galivel - 01 41 05 02 02 - 06 09 05 48 63 – galivel@galivel.com

15 sep. 22

L’inflation, finalement une chance pour le logement ?

L’inflation et ses conséquences sur le pouvoir d’achat des ménages français ont conduit le gouvernement à agir sans attendre. Le projet de loi comportant à cet égard des mesures d’urgence tous azimuts a achevé son parcours parlementaire. Il comporte plusieurs dispositions relatives au logement, premier poste budgétaire des familles et méritant à ce titre une attention particulière.
Ainsi, l’indice de référence des loyers d’habitation a été capé à 3,5% (et même moins dans certains territoires) et les APL ont été revalorisées. Enfin, les parlementaires ont précisé que les logements ne présentant pas les performances énergétiques nécessaires ou des caractéristiques de confort suffisantes ne pourraient plus faire l’objet de surloyers dans les zones d’encadrement.

Mais l’urgence ne doit pas faire oublier les difficultés structurelles du logement dans notre pays. Ainsi, les effets de l’inflation sur le rapport des ménages au logement sont criants : c’est parce que l’effort des locataires comme des accédants à la propriété ne leur laisse pas de marge de manœuvre que toute modification de leur équation budgétaire domestique les met en danger. Certes, la mobilisation du parc existant constitue enfin un axe structurant de la politique du logement, mais on sait bien qu’il ne suffira pas à répondre aux besoins. N’en déplaise à certains, même la rénovation et la remise sur le marché du stock de logements vacants ne permettraient pas de réduire le déficit d’offre qui devrait encore marquer les 20 prochaines années.

Car restent les questions de l’insuffisance de l’offre et des prix élevés. Deux sujets dont tous reconnaissent l’urgence, sans pour autant s’attacher à les traiter.

La première priorité du gouvernement doit consister à évaluer avec précision les besoins en logements neufs. Alors ministre du Logement, Emmanuelle Wargon avait commandé un rapport sur les aspirations résidentielles des Français : ils veulent des logements plus spacieux, plus lumineux, plus verts. Seule la production neuve peut répondre à ces désirs.

A écouter les déclarations de l’exécutif, tout se passe comme si la loi Climat et résilience et le zéro artificialisation nette (ZAN) avaient périmé la construction. Or, il nous appartient désormais de la penser selon d’autres exigences et d’autres codes. Acceptons l’idée de densifier, à l’heure où 70% seulement des potentiels de densité des plans locaux d’urbanismes sont exploités ! Il faut aussi surélever les immeubles existants. Sans un abondement massif de l’offre, les prix ne baisseront pas : cette vérité générale concerne l’immobilier autant que n’importe quel secteur d’activité.

Or, professionnels et administrations ne s’accordent toujours pas sur le nombre d’unités de logements à construire par an. Une telle approximation sur un sujet majeur pour l’avenir du pays n’est plus admissible. C’est uniquement grâce à une vision claire de nos besoins et la prise en compte des crises futures liées au changement climatique, des déplacements de population, et des dynamiques des territoires – métropoles, villes moyennes, et ruralité - que nous poserons les bases d’un aménagement éclairé.

Autre limite de notre modèle prudentiel, brutalement révélée par l’inflation : l’accès au crédit doit être ouvert, quand il ne cesse de se restreindre. Le calcul de notre taux d’usure est inadapté, et sa récente augmentation n’intègre pas assez l’inflation et l’évolution du coût de la ressource. Il laisse de côté des dizaines de milliers de ménages solvables, auxquels il n’est plus possible d’appliquer un taux rendant compte du prix de l’argent et des garanties et risques attachés à leur profil. Ce taux devrait s’ajuster au rythme de l’IRL, dût-on le caper au besoin, ou du taux du livret A.

L’inflation peut être vertueuse pour le logement, car elle a le mérite de révéler brutalement les maux profonds de la filière. Notre système, tendu à l’extrême, s’équilibre au trébuchet. La moindre baisse du reste à vivre des ménages, la moindre hausse des crédits, rendent la situation explosive. C’est à cette fragilité qu’il faut remédier, et dès à présent.