Contact médias : Carol Galivel - 01 41 05 02 02 - 06 09 05 48 63 – galivel@galivel.com

29 juin 23

Bilan du marché parisien des commerces au 1er semestre 2023

Au beau fixe

Knight Frank publie son nouvel « Essentiel », qui dresse le bilan du marché parisien des commerces au 1er semestre 2023

 

Après une année 2022 plutôt dynamique, la bonne tenue des grandes artères commerçantes parisiennes s’est confirmée au 1er semestre 2023. Si la situation économique française reste défavorable à la consommation en raison d’une inflation toujours élevée, les axes prime de la capitale continuent quant à eux de profiter du rebond du tourisme international. En mai, le taux d’occupation dans l’hôtellerie parisienne dépassait ainsi les 80 %, niveau comparable à celui de la même période en 2019. Avec 38 millions de passagers lors des cinq premiers mois de 2023, le trafic enregistré aux aéroports de Paris affiche quant à lui une hausse de 30 % en un an. Enfin, ce rebond des arrivées s’accompagne d’une nette augmentation des dépenses des touristes étrangers dans la capitale, estimée à plus de 10 % par rapport à leur niveau pré-Covid.

Difficultés de la mode : entre menaces et opportunités

La forte reprise du tourisme ne préserve pas pour autant le marché parisien des difficultés d’enseignes. Plusieurs procédures récentes concernent ainsi des marques présentes à Paris et y disposant de plusieurs boutiques (GAP, GO SPORT, SAN MARINA, KOOKAÏ, DON’T CALL ME JENNYFER, COTELAC, etc.), parfois situées sur de grandes artères et qui pour certaines ont déjà fermé leurs portes. Par ailleurs, le groupe FAST RETAILING a récemment annoncé vouloir se séparer de dizaines de boutiques PRINCESSE TAM TAM et COMPTOIR DES COTONNIERS, deux enseignes comptant au total près de 40 emplacements à Paris. « Les difficultés de l’habillement s’accentuent, ce qui n’est pas anodin pour Paris tant ce secteur représente une part importante de l’activité de ses grandes artères. Ainsi, la mode rassemble 40 % du nombre total d’emplacements recensés sur les 12 axes n°1 suivis par Knight Frank dans le cadre de son baromètre des commerces parisiens » note Antoine Salmon, Directeur du département Commerces chez Knight Frank France. Néanmoins, les fermetures de boutiques de mode peuvent aussi constituer de belles opportunités pour des enseignes souhaitant accélérer leur développement à Paris, comme illustré par la reprise par JD SPORTS de certains magasins GAP.

Troisième année consécutive de hausse des arrivées de nouveaux entrants

Le dynamisme des arrivées de nouvelles marques étrangères est également révélateur de la capacité d’attraction du commerce parisien. Ainsi, 2023 devrait être la troisième année de hausse consécutive du nombre de nouveaux entrants, avec 36 arrivées attendues à Paris contre 32 en 2022 et 28 en moyenne chaque année depuis 2015. « Ce chiffre est le plus élevé de la décennie après les 44 arrivées recensées en 2019. Au 1er semestre 2023, une quinzaine de nouvelles enseignes étrangères ont déjà ouvert leur premier magasin à Paris, parmi lesquelles DITA, PIOMBO ou PALM ANGELS rue Saint-Honoré, cette dernière arrivée confirmant l’importance de Paris sur la scène internationale du streetwear après les ouvertures de Stussy et Arigato l’an passé » détaille Antoine Salmon.

S’il fournit toujours un nombre important de nouveaux entrants, le secteur de l’habillement se voit dépassé cette année par celui de la restauration, avec une dizaine de nouveaux concepts italiens, asiatiques ou américains. « Malgré l’alourdissement des charges et les difficultés de recrutement, 2022 a été une bonne année pour la restauration en France. Cette tendance se poursuit en 2023, et plusieurs chaînes françaises ou étrangères se développent ou relancent leur expansion dans l’Hexagone » affirme Antoine Salmon. Ce dynamisme est particulièrement visible sur les grands axes parisiens, la restauration occupant un nombre croissant d’emplacements grâce à un ratio ouvertures / fermetures toujours positif. Le secteur compte ainsi pour près de 20 % des ouvertures recensées depuis un an sur les 12 axes suivis par Knight Frank, alors qu’il ne représente que 13 % des fermetures. « Hors des axes prime, la diversification de l’offre de restauration est également manifeste, notamment illustrée par le développement de concepts pointus de street food, de boulangeries ou encore de coffee shops » poursuit Antoine Salmon.  

L’expansion de la restauration ne se limite pas aux pieds d’immeuble, les food courts continuant par exemple d’essaimer dans la capitale. Après les projets ouverts l’an passé dans les « Ateliers Gaité » (FOOD SOCIETY, dans le 14e) et « Italik » (ICONIK, dans le 13e), Paris se prépare à accueillir un pôle de restauration au sein de la galerie du « 66 Champs-Elysées » et de « Boom Boom Villette », dans le 19e, marquant le repositionnement du centre commercial « Vill’Up ». La tendance est également visible en 1ère couronne, avec l’ouverture fin 2022 des « Halles Biltoki » à Issy-les-Moulineaux, avant celles, ces prochains mois, de la halle « Communale » des Docks de Saint-Ouen ou de FOOD SOCIETY à La Défense.

Le sport : toujours plus vite, toujours plus haut, toujours plus fort !

Le sportswear est un autre soutien de poids pour le marché immobilier des commerces. Il est vrai que le contexte est particulièrement porteur du fait de la hausse des ventes d’articles de sport et de la volonté de plusieurs marques d’ouvrir des boutiques en propre. Parmi les arrivées les plus récentes figure celle de la marque suisse de baskets haut de gamme ON RUNNING au sein du Marché Saint-Germain. D’autres marques de sport étrangères sont attendues ces prochains mois, dans les quartiers du Marais et de l’Opéra. « Les Champs-Elysées sont également une cible majeure pour les marques et grands distributeurs d’articles de sportswear. L’artère leur offre en effet une vitrine idéale et une très forte visibilité, amplifiée par la reprise du tourisme international et la tenue prochaine des Jeux Olympiques de 2024 » précise Antoine Salmon. L’avenue est aussi un axe privilégié pour les ouvertures de flagships, comme illustré l’an passé par les ouvertures du PSG et de FOOT LOCKER et, plus récemment, l’annonce du transfert d’ADIDAS au n°88. De fait, le flagship est un format idéal pour les grandes marques de sport, permettant d’offrir à leur clientèle, plus jeune et connectée que la moyenne, la quintessence des nouvelles expériences d’achat (mise en valeur de l’histoire de la marque, présentation de collections exclusives, conseils en matière de pratique sportive et de diététique, technologies interactives, etc.). 

Le luxe étend son emprise

Le sport présente en cela un certain nombre de similitudes avec le monde du luxe, également très actif sur les Champs-Elysées. Les grands groupes y étendent ainsi leur influence, à l’exemple de KERING avec l’ouverture attendue de SAINT LAURENT au n°123, RICHEMONT qui y placera prochainement deux de ses marques de montres, PANERAI et IWC, et bien sûr LVMH avec les projets emblématiques de DIOR et LOUIS VUITTON et l’acquisition auprès de GECINA de son flagship historique du n°101. Quelques ouvertures significatives de flagships sont aussi programmées sur d’autres axes, parmi lesquels ceux d’ALAIA rue du Faubourg Saint-Honoré, de A. LANGE & SOHNE rue de la Paix ou encore de GUCCI rue Saint-Honoré. Enfin, les prochains mois confirmeront le retour au premier plan du Triangle d’Or, ainsi qu’un certain retour en grâce des artères les plus haut de gamme de la Rive Gauche (Saint-Germain, Sèvres, Grenelle), traditionnellement très prisées par une clientèle locale aisée et les touristes européens et américains.

« Après deux années de hausse, le nombre d’ouvertures de boutiques de luxe à Paris pourrait toutefois diminuer. Une trentaine sont attendues en 2023 contre 34 en 2021 et 39 en 2022 » prévoit Antoine Salmon. Une pause plus qu’un ralentissement compte tenu du chiffre élevé des inaugurations depuis la fin des confinements. « Les marques de luxe n’en continuent pas moins d’accroître leur empreinte à Paris, mais par d’autres canaux que les ouvertures de flagships. Celles-ci investissent ainsi tous les domaines de l’art de vivre parisien : celui de la culture et du patrimoine – à l’exemple de l’ouverture prochaine de la Fondation Cartier en face du Louvre, celui de la gastronomie et des spiritueux – à l’image du nouveau bar à cocktails de Moët Hennessy au 165 boulevard Saint-Germain, ou encore du spectacle et de l’évènementiel – comme l’a si bien illustré le récent défilé Louis Vuitton sur le Pont-Neuf » poursuit Antoine Salmon.     

La baisse de la vacance se poursuit

La solidité du marché parisien se lit aussi dans le turn-over moins rapide des enseignes et un nombre plus réduit d’opportunités d’emplacements disponibles sur les douze axes suivis par Knight Frank. A la fin du 1er semestre 2023, le taux de vacance moyen y atteint 5,8 % contre 6,8 % il y a un an et 9 % deux ans auparavant. « Après la hausse enregistrée au plus fort de la crise sanitaire, la vacance a rapidement diminué sur les principales artères de la capitale. Ces derniers mois, l’absorption a été plus mesurée, mais la tendance reste positive malgré un contexte économique plus fragile » souligne Antoine Salmon.

L’une des baisses les plus nettes a été observée boulevard Saint-Michel, avec un taux de vacance passé de 19,7 % il y a deux ans à un peu moins de 12 % à la fin du 1er semestre 2023. Les locaux vides sont même devenus quasi inexistants entre le boulevard Saint-Germain et la place Saint-Michel, son tronçon le plus fréquenté. La baisse se poursuit également sur l’avenue de l’Opéra et la rue de Rivoli, cette dernière artère ayant vu son taux de vacance passer de 15 % il y a deux ans à 5,3 % désormais. « Avec la réouverture de la SAMARITAINE, l’arrivée d’IKEA ou encore d’UNIQLO, la rue de Rivoli a parfaitement illustré le regain de vigueur des axes prime parisiens depuis la fin de l’épidémie de Covid-19. Ces prochains mois, il faudra suivre de près ce secteur, dont la transformation va se poursuivre avec plusieurs projets immobiliers majeurs comme la restructuration de l’ancien immeuble C&A au n°126, la vente annoncée du BHV MARAIS, la future Fondation CARTIER ou encore le futur hôtel LOUIS VUITTON face au Pont-Neuf » détaille Antoine Salmon.

La vacance diminue également sur les Champs-Elysées. Si les relocalisations d’enseignes déjà présentes sur l’avenue et souhaitant y moderniser leur flagship ont dominé les derniers mois (FOOT LOCKER, PSG, LACOSTE, ZARA, ADIDAS, etc.), elles ne constituent pas l’essentiel de l’activité. « Plusieurs transactions récentes et en cours montrent que la dynamique tient désormais tout autant, voire plus, à la demande de marques désirant ouvrir leur premier magasin sur l’avenue, dans les domaines du luxe, du sport ou encore de la mode premium » poursuit Antoine Salmon. La plupart des autres artères voient leur taux de vacance se stabiliser à des niveaux souvent très bas, à l’exemple des principales artères du luxe (avenue Montaigne, rue Saint-Honoré, etc.), de la rue des Francs Bourgeois ou de la rue de Passy. Une seule grande artère est à contre-courant de cette tendance générale : la rue de Rennes, dont le taux de vacance repart à la hausse (9%) malgré quelques projets significatifs (JD SPORTS sur l’un des deux anciens magasins GAP, BREITLING au n°51, etc.).

Investissement : peu de transactions, mais des volumes élevés

Le bilan à mi-année est également positif pour le marché de l’investissement. « Déjà élevées en 2022 avec près d’1,6 milliard d’euros investis, les sommes engagées sur le marché parisien des commerces le sont restées au 1er semestre 2023 avec un peu plus d’un milliard d’euros » indique Antoine Grignon, directeur du département Investissement chez Knight Frank France. Ce montant, qui représente près des deux tiers de l’ensemble des volumes investis en commerces dans l’Hexagone, a été gonflé par quelques signatures majeures : l’achat par INGKA CENTRES du centre commercial « Italie 2 » et de son extension « Italik », une partie de la cession à KERING du 35-37 avenue Montaigne[1], ainsi que l’achat récent par AEW de la galerie « Passy Plaza ». « Ces opérations comptent pour 87 % de l’ensemble des sommes engagées au 1er semestre 2023 sur le marché français des commerces » précise Antoine Grignon. D’autres transactions significatives ont été réalisées, comme la cession à BLACK SWAN CAPITAL du CASTORAMA du 11 boulevard de Grenelle (Paris 15e) et la finalisation de l’achat par FINAMAS du 62 avenue des Champs-Elysées.

« La performance du marché parisien aurait été encore meilleure sans la forte remontée des taux d’intérêt, qui a mis certaines opérations de cession en stand-by et nettement allongé les durées de négociation » ajoute Antoine Grignon. Malgré cela, les volumes investis sur l’ensemble de 2023 pourraient bien dépasser le total de 2022 en raison de la finalisation possible de quelques grandes transactions (cession du « BHV Marais » à la SOCIETE DES GRANDS MAGASINS) et de la mise sur le marché de plusieurs actifs unitaires ou portefeuilles de grande taille.

Des perspectives positives, mais quelques interrogations

« Le marché parisien des commerces, du moins celui des axes prime, a parfaitement passé le « stress test » de la crise sanitaire. Retour des touristes, demande soutenue des enseignes pour les meilleurs emplacements, réduction de la vacance, stabilisation voire hausse des valeurs locatives : tout cela concourt à rassurer les investisseurs et à maintenir l’attractivité de la capitale » indique Antoine Grignon. L’activité n’en est pas moins pénalisée par la remontée des taux d’intérêt et l’attentisme des investisseurs, par ailleurs amplifié par le nouveau PLU bioclimatique qui encadre de façon plus stricte les changements de destinations et contient quelques dispositions particulièrement contraignantes (mise en place d’une servitude de mixité fonctionnelle, identification par la Ville d’emplacements réservés fixant une obligation de construction de logements abordables).

Une autre mesure pourrait avoir des incidences, cette fois sur les enseignes : l’instauration d’une zone à trafic limitée (ZTL) au cœur de la capitale, dont les modalités (périmètre, date de mise en place) doivent encore être précisées. « L’impact potentiel de la ZTL sur les commerçants est difficile à cerner. Cela dit, les restrictions de circulation précédemment mises en place dans certains quartiers, comme le Marais ou la rue de Rivoli, ne semblent pas avoir réellement entravé leur dynamisme » avance Antoine Salmon. Trois ans après le déclenchement de la crise sanitaire, rien ne semble donc devoir entamer la solidité du marché parisien des commerces, d’autant que les prévisions d’arrivées de touristes étrangers restent au beau fixe. « Le dynamisme du tourisme international soutient incontestablement l’activité des commerces à Paris et alimente les plans d’expansion des enseignes. Celles-ci peuvent d’autant plus se projeter que ce regain s’annonce durable, et devrait en outre être amplifié par la tenue prochaine des Jeux Olympiques et le retour progressif des touristes asiatiques, quasiment absents depuis trois ans » conclut Antoine Salmon. 

 

[1] Partie représentée par le flagship loué à Valentino.