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20 fév. 24
Le financement du maintien à domicile, grand oublié du bien vieillir
Le Sénat a adopté mardi 7 février dernier, en première lecture, la proposition de loi « bien vieillir » en supprimant cependant une grosse partie des 146 amendements proposés par les députés en novembre dernier. Rebaptisée « proposition de loi portant diverses mesures relatives au grand âge et à l’autonomie », ce texte doit encore passer en commission mixte paritaire afin d’obtenir une version finale. Une issue qui s’avère incertaine, compte-tenu des dissentions entre les deux chambres…
Alors qu’en 2030, selon l'INSEE, près d'un habitant de la France métropolitaine sur trois aurait au moins 60 ans contre un sur cinq actuellement[1], cette proposition de loi ne va pas au bout des défis du vieillissement de la population et des promesses de « bâtir la société du bien vieillir en France ». La problématique concrète du senior centralisée sur le financement de son autonomie à domicile demeure sans réponse.
Une première pierre à l’édifice mais insuffisante
Entre promesses avortées, reformulations et reports, le texte relatif au « bien vieillir » illustre parfaitement les difficultés du gouvernement face à l’enjeu du grand âge. Après le scandale des Ehpad, Orpéa en tête, et face au défi du vieillissement de la population française, la proposition de loi a le mérite d’amorcer une avancée avec la validation de mesures importantes relatives à la perte d’autonomie, à la lutte contre l’isolement des personnes âgées ou en situation de handicap et au signalement des maltraitances.
La reconnaissance du travail des intervenants et aides à domicile, notamment par la création d’une carte professionnelle d’ici 2025 et un soutien à leur mobilité pouvant aller jusqu’à l’obtention du permis de conduire devrait, aussi, participer à l’amélioration des conditions de vie des seniors. Cependant, l’amputation par le Sénat des amendements relatifs aux contraintes financières pour les Ehpad lucratifs (obligation de réserver jusqu’à 10 % de leurs bénéfices à l’amélioration de la qualité de la prise en charge de leurs résidents) et à la transparence de la part de l’ensemble des établissements (l’obligation, notamment, de transmettre leur ratio salariés/résidents à la CNSA, Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie), laisse craindre de nouveaux scandales.
Même allégée d’une partie des amendements proposés par les députés, la loi qui pourrait être adoptée à l’issue de la commission mixte paritaire, représente une « première démarche nécessaire et louable » affirme Stéphane Revault, co-fondateur de Dillan, société spécialisée dans le financement des seniors. « Pourtant, on peut lui reprocher de se concentrer sur les aides pour les opérateurs du secteur (Ehpad, instituts spécialisés, aides à domicile) et les agences publiques (régions ou départements) en oubliant la problématique du maintien à domicile et de son financement ou autofinancement pour le senior ».
Le financement du maintien à domicile des seniors, un enjeu crucial
Le vieillissement amorcé de la population française va engendrer une hausse des problématiques relatives au troisième et quatrième âge (plus de 90 ans) qui ont souvent besoin de soins et d’un accompagnement spécifiques. Or, alors que les politiques cherchent des solutions du côté des établissements privés ou publics, le souhait d’un « bien vieillir chez soi », exprimé par 95 % des seniors, n’est toujours pas pris en compte.
« Une fois de plus, cet enjeu, qui était présenté comme capital pour le quinquennat et qui sera une constante dans les années à venir, est traité par des mesurettes, des observatoires et des rapports, mais n’apparaît pas dans les textes législatifs proposés », regrette Stéphane Revault.
Face à l’inflation, la revalorisation des pensions de retraite en juillet dernier n’a pas enrayé la baisse du pouvoir d’achat des seniors et les difficultés financières associées à l’adaptation de leur logement pour rester vivre à domicile. Des mesures existent, comme MaPrimeAdapt’ et le crédit d’impôt adaptation, mais elles restent insuffisantes, ne touchant pas l’ensemble des seniors. En effet, la prime ne concerne que les revenus modestes et très modestes et le crédit d’impôt les revenus intermédiaires. C’est là tout le problème : les Français veulent vieillir chez eux, dans des logements dont ils sont propriétaires, mais n’en ont pas les moyens faute de liquidités. D’autant qu’à partir de 70 ans, ils subissent une exclusion quasi-totale des systèmes de financement bancaires traditionnels.
L’intérêt de monétiser son logement pour financer son maintien à domicile
Selon l’INSEE, plus de 73 % des plus de 70 ans sont propriétaires d’un patrimoine immobilier, généralement leur résidence principale. Or, par essence, cette ressource n’est pas accessible, car illiquide...C’est là tout le paradoxe !
La monétisation de leur résidence principale doit permettre aux seniors en quête d’un moyen de financer leur maintien à domicile (frais d’une aide à domicile, de mise aux normes ou d’adaptation de logement…) d’obtenir des liquidités…d’un actif illiquide.
En cédant une partie ou la totalité de la nue-propriété de son bien, le senior met à profit sa propriété immobilière et dégage des liquidités pour financer son « bien vieillir » comme il le souhaite, sans avoir à quitter son logement puisqu’il en conserve l’usufruit.
De plus, contrairement au viager, en conservant une part de la nue-propriété, ou du moins une faculté de rachat de celle-ci, le senior s’assure une certaine sécurité et préserve l’héritage qu’il laissera à ses enfants. C’est bien souvent à ces derniers qu’il reviendra ensuite de décider de l’avenir du bien, par un rachat des parts cédées ou par la vente des parts restantes. Ces solutions, équilibrées, peuvent être des outils à la fois efficaces, pérennes et éthiques.
Alors que les professionnels du secteur attendent avec impatience la présentation de la « loi de programmation pluriannuelle pour le grand âge » (promise en début de quinquennat), dont la conformité constitutionnelle n’a toujours pas été approuvée par le conseil d’État[2], et que l’action étatique peine à relever le défi du maintien à domicile des seniors, favoriser et faciliter l’autofinancement de ces derniers semble une solution pérenne et parfaitement adaptée.
[1] Cette évolution s'explique essentiellement par le vieillissement des enfants du « baby-boom ». L'âge moyen des habitants pourrait ainsi augmenter de 5 ans et demi en 30 ans et approcher les 44 ans en 2030, les moins de 20 ans ne formant que 21 % de la population contre plus du quart actuellement
[2] Un avis devant être rendu le 8 février a été reporté à la fin du mois de février.