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Économie de la fonctionnalité : de l’économie de la propriété à l’économie d’usage
Nous mutons progressivement d'une société du « tout jetable », basée sur une économie linéaire (extraire, fabriquer, consommer, jeter), vers un modèle économique circulaire. Celui-ci vise à partager, réutiliser, réparer, rénover et recycler les produits et les matériaux existants le plus longtemps possible afin qu'ils conservent leur valeur et leur utilité. L’économie de la fonctionnalité (EF), parfois aussi appelée économie de la fonctionnalité et de la coopération (EFC), s’intègre pleinement dans cette dynamique. Le CAH a exploré cette thématique à travers deux études : l'une quantitative, réalisée auprès de 1 591 ménages représentatifs des propriétaires français, et l'autre qualitative, basée sur l'analyse de 10 ménages.
En effet, l'économie de la fonctionnalité repose non plus sur la propriété, mais sur l’usage. En clair, le consommateur n’achète plus le bien ou l’équipement, mais en acquiert l’usage. Le vendeur en reste propriétaire et en assure l’entretien ainsi que la maintenance moyennant une redevance mensuelle. Ce nouveau mode de détention semble particulièrement adapté aux équipements coûteux et/ou innovants qui requièrent une maintenance régulière et technique. Transposés aux logements, ces principes pourraient s’appliquer aux équipements liés à l’accessibilité (grand âge ou handicap), à la connectivité, et au confort, notamment thermique.
Les avantages de l’EFC sont nombreux :
- Évite les dépenses imprévues et le recours à un emprunt bancaire, souvent difficile à souscrire, notamment pour les retraités en raison de leur âge et de leurs niveaux de revenus.
- Incite les constructeurs à fabriquer des produits plus durables et à abandonner l’obsolescence programmée.
- Encourage les utilisateurs à se tourner vers des produits innovants, comme les PAC (pompes à chaleur).
- Remet l’humain au sein de la relation avec l’intervention régulière du prestataire. Un partenariat s’installe, hors du manichéen rapport client-vendeur. D’où l’appellation EFC, économie de la fonctionnalité et de la coopération.
Une segmentation des publics et des attentes variées
Les propriétaires-occupants français se répartissent en quatre profils face à l’EFC : des volontaires convaincus par l'écologie, des sceptiques en demande de preuves, des opportunistes guidés par le coût, et des réticents attachés à la propriété. Les jeunes générations et les cadres montrent une plus grande ouverture à ce modèle, motivés par une vision utilitariste des équipements et des considérations écologiques. Les retraités, majoritairement réticents, y voient néanmoins des avantages pratiques pour les équipements lourds tels que les chaudières.
Des précautions nécessaires pour l’adhésion
Pour que l’EFC trouve son public, certaines conditions doivent être respectées :
- Des contrats clairs sans mauvaises surprises : Les consommateurs redoutent les coûts cachés et les mensualités fluctuantes. La fiabilité des offres est citée comme prioritaire par 60 % des répondants.
- Absence d’ingérence : Le prestataire doit se limiter à la maintenance sans surveiller l’utilisation des équipements.
- Éviter le greenwashing
- Pas d’incitation implicite à la surconsommation, comme cela peut se voir avec le principe du leasing ou avec des objets comme les téléphones, les tablettes et certains électroménagers.
Si l’EFC séduit par son potentiel écologique, elle doit être accessible à toutes les classes sociales. Cela passe par des garanties sociales solides pour éviter une surcharge financière pour les ménages modestes. Par exemple :
- Tarifs progressifs : Des mécanismes équitables sont nécessaires pour limiter les inégalités.
- Accès élargi aux équipements durables : Les équipements reconditionnés sont bien accueillis (par 68 % des répondants), renforçant la logique d’économie circulaire.
En revanche, les équipements connectés comme la domotique suscitent encore des réserves. Ils sont perçus comme coûteux et rapidement obsolètes. Les équipements utilitaires tels que les pompes à chaleur ou les monte-escaliers apparaissent comme plus adaptés à ce modèle, car ils répondent à des besoins pratiques.
L’EFC, un levier pour l’habitat durable
L’économie de fonctionnalité et de la coopération, en favorisant l’usage plutôt que la possession, incite à des pratiques de consommation plus respectueuses de l’environnement tout en renforçant le confort des ménages. Son adoption pourrait également dynamiser la rénovation du parc résidentiel, en intégrant des solutions adaptées aux besoins des personnes âgées et à mobilité réduite.
Le Club de l’Amélioration de l’Habitat (CAH) explore ces enjeux dans son guide pratique L'économie de la fonctionnalité et de la coopération, pour un habitat responsable, offrant des solutions concrètes pour un logement conciliant durabilité, confort, et solidarité.